Pau

MER PAU inaugure la rue des Républicains Espagnols en Béarn

A Pau, l’association MER – Mémoire de l’Espagne Républicaine – concrétise un long travail pour le Devoir de Mémoire.

Claudine Bonhomme, Présidente de MER,  explique dans le texte publié ci-dessous ce que fut le parcours de centaines de milliers d’Espagnols, chassés de leur pays par la peste brune européenne. Si nous n’y prenons pas garde, nous aurons à affronter une nouvelle catastrophe car la bête bouge encore. Iinsidieusement, elle pénêtre les esprits, canalise les mécontentements et prend légalement le pouvoir, pays après pays. Cela ne rappelle-t-il rien ?

« La  proclamation de la IIème République en Espagne le 14 avril 1931, fut pour le peuple espagnol un grand jour empli d’espérance et de fraternité.

À ce peuple inféodé aux grands propriétaires terriens, au patronat et à l’Église, la République apportait l’école et la santé pour tous, un code du travail avec des droits nouveaux, la possibilité pour les femmes de faire des études et de travailler, le droit de vote pour elles ainsi que le droit à l’avortement.

L’embellie progressiste fut de courte durée ; 8 ans plus tard, la IIème République  était anéantie par le coup d’état de Franco et les fascismes européens.

On sait que Pau abritait depuis « l’entre-deux guerres »,  notamment au Quartier du Hédas surnommé alors « la Petite Espagne », nombre de migrants économiques espagnols comme la famille de Jesús Cardiel qui  y résidait depuis 1923. Jesùs Cardiel sera ensuite Guérillero et Résistant,

Le premier acte de résistance d’ampleur au régime de Vichy connu à Pau, est le fait de la MOI Espagnole (Main d’œuvre Immigrée), au printemps de 1941. A l’occasion de la visite de Pétain le 10 avril, ces femmes  et ces hommes avaient inscrit sur les murs et les chaussées du quartier du Hédas ainsi que des Places Grammont et de La Monnaie, des slogans anti-allemands et des mots hostiles à la collaboration.

Chassés par le coup d’état franquiste, Les Républicains Espagnols avaient subi la Retirada et été « accueillis » par la France de la même façon indigne que les « migrants » d’aujourd’hui. Ils ont connu les camps, et pour certains, les camps nazis.

Beaucoup se sont engagés dans la Résistance, participant, dès 1942, à la mise en place des premiers maquis du Béarn à Pédéhourat et St Christau.

En 1943, ils créent la 10ème Brigade de Guérilleros des Basses-Pyrénées.

Francisco Guzmán, initiateur de cette 10ème Brigade, acteur de la libération de la Vallée d’Aspe en août 1944, dira par la suite :

« Nous avons laissé en Béarn des camarades qui ont laissé leur vie pour un idéal de liberté (…) Il y a pour nous quelque chose de sacré dans cette terre que nous avons défendue et libérée … »

Julian Martin, lui, déclarera devant des élèves :

« Ce que j’ai fait est bien moins important que ce pourquoi nous l’avons fait ».

À la fin de la guerre, déchus de la nationalité espagnole parce que Rouges, ces combattants se sont installés parmi nous avec leurs familles.

Un bon nombre d’entre eux a vécu à Pau, entre-autres Côte de la Fontaine au Quartier du Hédas.

Ils ont largement contribué au développement économique de notre région, tout en restant fidèles aux engagements de leur République, notamment pour la justice sociale, la solidarité, la paix.

En donnant à l’une de ses rues le nom de « Rue des Républicains Espagnols en Béarn », la ville de Pau rend un hommage mérité à ces résistants et aux valeurs qu’ils ont portées leur vie durant.

C’est à l’École Marca, non loin d’ici, que les enfants des réfugiés espagnols du Hédas ont accédé à l’enseignement public.

La plupart de ces enfants ont ensuite exercé des métiers à responsabilité. Une fierté, et la réalisation d’une ambition pour leurs parents, engagés pour que la population tout entière accède à un avenir meilleur.

Tout en regrettant que la plupart des héros de cette histoire ait déjà disparu, l’association paloise Mémoire de l’Espagne Républicaine remercie la municipalité pour cette Rue des Républicains Espagnols en Béarn qui permet aux très rares survivants, aux familles, aux amis et aux camarades de ces combattants, d’apprécier pleinement ce moment exceptionnel.

On peut cependant remarquer que maintenant qu’y existe une rue à la mémoire des Républicains Espagnols, il y a toujours, à Pau, un Cours Léon Bérard.

Léon Bérard, politicien originaire de Sauveterre-de-Béarn, antisémite notoire et  ministre de Pétain, reconnut au nom de l’état français de l’époque, le gouvernement Franquiste avant que celui-ci ne soit installé ;  puis participa à l’élaboration des lois scélérates de Vichy qui organisèrent l’exclusion des juifs et leur déportation.

Les déportés juifs du Pays de Bade et du Palatinat, à leur arrivés au Camp de Gurs, bénéficièrent en revanche de la solidarité concrète des Républicains Espagnols qui les y avaient précédés. Il en est allé de même dans le pays tout entier.

Aujourd’hui, nous vivons un moment important, épilogue d’une mobilisation qui aura permis que soit inaugurée, à Pau, une rue à la mémoire des Républicains Espagnols.

Ne devons-nous pas, désormais, amplifier le rassemblement pour que soit débaptisé le Cours Léon Bérard ?

Je terminerai mon intervention en remerciant les formations amies qui nous ont aidés à faire connaître cette initiative, la chorale Asphodèle, ainsi que toutes les personnes présentes, les amis, les camarades y los compaňeros qui ont répondu à notre invitation et dont la présence nous encourage. »

Claudine BONHOMME
Présidente de MER – Mémoire de l’Espagne Républicaine

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